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Les quatorze années perdues d'Amélie - Femme aujourd'hui - La revue du témoignage urbain

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Femme aujourd'hui

Les quatorze années perdues d’Amélie

Par amour, Amélie, trente et un ans, a tout essayé pour sauver son couple durant quatorze ans. Son espoir et son énergie n’ont pas suffi. Bouleversée, cette femme a dû tout assumer : la maison, le travail et l’argent. Elle a pris conscience qu’elle avait la force mentale d’un homme, avec le physique d’une femme. Son rêve reste de rencontrer un homme tel que Stallone...


Aujourd’hui, je me sens... en forme, ça va !
Je n’oublierai jamais... la famille.
Le bonheur, c’est simple... comme bonjour !
Je suis fière... de moi.
Le plus bel homme du monde c’est... Sylvester Stallone.
Quand j’étais petite, je croyais que... la vie était rose.
Les femmes sont... indispensables.
Les hommes sont... rares sur le marché.
Il n’a rien d’importance... sauf l’avenir.
Dans ma petite enfance... j’ai conservé ma gentillesse.
Quand je me fâche... je pète les plombs !
Je regrette d’être... aussi gentille.
Le meilleur remède à un chagrin d’amour... c’est de retrouver un autre homme !
Si j’étais un homme... je ne serais pas là !!

Koinai : C’est quoi, pour toi, être une femme ?
C’est beaucoup de responsabilités, c’est une vie qu’on doit assumer pratiquement seule. Les hommes sont de plus en plus irresponsables et j’ai l’impression qu’ils relâchent leurs responsabilités à tous niveaux sur la vie en général. La femme a pris beaucoup de place dans le monde actuel. Le travail lui a donné beaucoup d’importance, mais maintenant elle est obligée de suivre, d’assumer ses responsabilités, vu qu’elle en a de plus en plus. Je pense que l’homme est allé en sens inverse et il commence à s’appuyer sur nous. Certains seulement, que les femmes dirigent... C’est une idée générale.

K : Te sens-tu femme aujourd’hui ?
Je me sens femme parce que je suis femme. Je n’ai pas de sexe masculin, mais je me sens homme dans ma tête. Cela veut dire prendre des responsabilités alors que normalement un homme doit les assumer dans une maison : le boulot, les rentrées d’argent, les enfants, comme au temps d’avant, la génération passée qui disparaît de plus en plus... Mais la femme prend une place trop importante.

K : Justement, si la femme prend trop d’importance, l’homme fait quoi ?
L’homme doit suivre, oui, c’est une obligation, c’est pas une envie qu’il doit se donner, c’est une obligation, il faut être plus fort et battant que la femme, voilà...

K : Quelle est la différence entre un homme et une femme ?
L’homme doit être plus costaud au niveau moral, c’est lui qui devrait s’engager, assumer de prendre des responsabilités, et la femme, elle, est là pour la vie du couple, l’aider dans sa vie, lui rendre la vie plus facile, si, bien sûr, elle est en couple. Maintenant, elle travaille, donc elle est sensée soutenir l’homme. L’homme, c’est le principal dans la maison et dans le couple, l’homme, c’est l’homme.

K : Pourquoi ne tient-il plus sa place dans le couple ?
Dans cette société, l’homme se sent rabaissé vu que la femme n’a plus besoin de lui, l’homme se sent faible, mais certains, pas tous. Il n’arrive plus à assumer, c’est un cercle vicieux.

K : Le rôle de la femme serait-il de soutenir l’homme ?
Oui, le soutenir, ne pas être la seule à élever les enfants et ne pas devoir ramener l’argent à la maison.

K : Comment vois-tu le couple ?
Le couple “normal”, c’est l’homme qui doit amener l’argent à la maison. La femme, qui ne se sent pas obligée de travailler, élèverait ses enfants avec suffisamment d’argent pour la famille. Evidemment, à notre époque, c’est difficile de ne pas travailler à deux, parce que la vie est devenue très difficile. On est contraint d’arriver à faire un ménage solide et il faut plus d’argent, c’est pour ça que la femme est obligée de travailler et en même temps, d’apporter sa contribution au quotidien. L’homme doit tenir sa place, et sa place est importante.

K : Pourquoi les hommes traitent-ils les femmes d’emmerdeuses ?
Parce que l’homme maintenant n’a plus envie d’assumer, il a choisi une vie de couple, pourtant ! Si l’homme assume ses tâches, il ne devrait pas avoir de problèmes. Ils ne peuvent plus fréquenter leurs copains comme avant...

K : La femme a acquis ses droits, en profite-t-elle et est-ce un inconvénient pour l’homme ?
D’un côté, je me pose la question, je me demande si elle n’a pas obtenu trop d’assurance. L’homme se met dans une position où il est équivalent à la femme, c’est presque l’égalité entre nous.

K : N’est-ce pas trop lourd pour l’homme que la femme soit libre de ses actes ? As-tu déjà vécu en couple ? As-tu des enfants ?
Je suis assez réfléchie et posée pour ne pas avoir fait d’enfants !

K : Que penses-tu de la question du salaire ?
Sans regarder les salaires, le fait d’assumer ma vie, d’arriver à vivre, à survivre, à notre époque, l’homme est à égalité de la femme. La femme est aussi capable de s’assumer, autant qu’un homme.

K : Y a-t-il encore des inégalités ?
Oui, évidemment ! Nous n’avons pas le même salaire. D’un côté, c’est un inconvénient et d’un autre, une femme reste une femme.

K : Est-ce important, d’avoir des enfants ?
C’est le résultat de chacun... tout le monde espère avoir un enfant, c’est normal, c’est ce qu’on espère dans la vie, d’avoir une descendance. Sinon, on se bat pourquoi ? On se bat pour créer des choses, pour qui ? Pour quoi ? Pour notre prochain !

K : Les femmes sont en train de changer...
Ça les rapproche au niveau mental de l’homme, puisqu’elles arrivent à s’assumer aussi bien seules qu’un homme seul, donc il ne faut pas regarder qu’au niveau du salaire, mais je pense que l’égalité se rapproche entre l’homme et la femme dans la société. Ça change beaucoup de choses au niveau des mentalités. Dans le couple évidemment aussi, ça se répercute. L’homme ne se sent peut-être pas d’assurer le rôle essentiel qu’il devrait avoir dans le couple, le rôle doit être à égalité avec la femme.

K : Il n’assume pas le fait que la femme n’ait plus besoin de lui, par exemple au niveau financier...
Oui voilà ! Il ne se sent peut-être plus indispensable... je ne sais pas... Ça le rabaisse un peu au niveau de la force, il ne sent pas aussi fort et indispensable qu’avant puisque la femme prend plus d’importance. C’est un tout.

K : Par rapport aux enfants ou à la gestion de la famille en général puisqu’avant l’homme travaillait et que la femme s’occupait des enfants. Maintenant que la femme travaille, n’est-ce pas avoir un rôle actif ?
Oui mais justement, les deux sexes, en principe, travaillent et quand cela ne fonctionne pas au niveau du couple, l’homme a le droit de récupérer ses enfants. Si un des deux parents ne travaille pas, cela ne peut pas fonctionner. Maintenant, c’est difficile de ne pas avoir deux salaires, la vie est plutôt chère.

K : Il y a de plus en plus de couples qui se séparent, cela vient d’où ?
Parce qu’il y a l’un des deux qui ne donne pas autant que l’autre, il est plus à la traîne, n’est pas aussi actif et ne se donne pas à fond. Il ne se donne pas les moyens ni l’importance de la vie, il n’y a pas de donnant donnant de chaque côté.

K : Et de l’incompréhension ?
Oui, de l’incompréhension, oui, si on veut... Du moment que la vie nous oblige à aller travailler, je ne vois pas où elle peut être.

K : Tu as déjà vécu un mariage ou une séparation ?
Pas de mariage, mais une séparation. Après quatorze ans.

K : Quand on tient quatorze ans, c’est parce qu’on fait beaucoup d’effort ?
Oui, parce qu’on espère et que rien ne vient, et finalement, il y a saturation.

K : Il faut beaucoup de patience pour attendre durant toutes ces années...
Oui, quand même, ou alors c’est de la nonchalance (rires).

K : Comment fait-on pour avoir autant de patience ?
Parce que on a envie d’y croire, parce que le train train fonctionne bien, enfin, tant bien que mal, mais il arrive parfois où cela ne suffit plus. Il faut que le partenaire se bouge, sinon vivre seule c’est pareil, cela revient au même. Il faut toujours espérer une vie meilleure et ne pas stagner.

K : Quand tu dis que tu as de l’espoir, justement, quatorze ans c’est pas mal ?!
De l’espoir d’avoir un retour par rapport à ce que j’ai donné. Le simple fait de donner de l’argent pour la maison et de participer normalement à une vie de couple se fait à deux à tous niveaux... des concessions du mieux qu’on peut...

K : Pourquoi l’homme ne veut pas comprendre qu’il doit travailler ?
Il ne cherche pas à comprendre, il se complaît dans son petit monde en sachant que la femme va travailler... Il y en a beaucoup comme ça, je ne suis pas la seule femme, elles assument le boulot, la maison et la paye rentre. Le mari va travailler de temps en temps, quand le chômage commence à baisser. Il réagit comme ça, il s’arrête et là, il réfléchit et finalement le fait d’aller travailler quelquefois ne lui apporte pas plus que de rester au chômage.

K : Mais par rapport à ça, il réagit comment ?
Lui, il travaillerait saisonnier, ça lui suffirait, mais le travail saisonnier ce n’est pas bon pour l’avenir.

K : Il préfère ne pas aller travailler et te perdre ?
Oui, même s’il a une réaction, je n’y crois plus.

K : A quel moment as-tu décidé que c’était fini ?
C’est un ras-le-bol, et à la limite, c’est une personne qui est indésirable à la maison.

K : Et dans ce cas, ça se résout comment ? Fais tes valises et pars ?
Oui, il ne faut pas être dégueulasse à ce point là... Je ne vais pas le mettre à la rue avec ses bagages... Non, je lui laisse un peu de temps pour se remettre, parce qu’il ne s’est jamais mis et le temps de se prendre en main et de s’assumer tout seul.

K : En tant que femme, qu’en penses-tu, arrivée au bout de quatorze ans ?
J’ai perdu quatorze ans... Quatorze années de ma vie que j’ai perdues et le temps passe vite, j’ai pris mon temps.

K : Quand tu l’as rencontré, il était déjà dans cette situation ?
Quand je l’ai rencontré, j’avais dix-sept ans. Lui, sortait de l’école et vivait chez ses parents, et moi je partais aussi de chez mes parents pour aller m’installer dans un petit appartement. Il m’a suivie et à l’époque, il ne travaillait pas. Je travaillais pour 2930 francs par mois, je m’assumais, mais lui n’a pas trouvé de suite du boulot. Maximum, durant ces années, il a dû travailler quatre ou cinq années entières, c’est tout. Il me disait que je ne lui ai pas donné l’envie de travailler, je ne pense pas que ce soit le bon terme. Ce n’est pas ma faute, si tout le monde avait envie de travailler, ce serait magnifique, la vie serait facile, ce n’est pas à moi de lui dire d’aller travailler.

K : A quel moment t’es-tu rendue compte qu’il n’allait pas faire d’effort ?
Petit à petit, je ne pourrais vous dire une date. Cela s’est dégradé de plus en plus. En ce moment nous sommes dans les Alpes, j’y habite depuis quelque temps, il se croit en vacances. C’est peut-être aussi pour ça qu’il a choisi le travail saisonnier. Il avait ses randonnées, ses petites promenades, bon hein, après, le travail, c’était secondaire, il se croit toujours dans les Alpes pour être amplement en congé. C’est peut-être pour ça qu’il a choisi ce boulot saisonnier de travailler six mois et être en congé. La femme est capable de se faire une carapace. J’ai l’impression que l’homme est plus naïf, la femme doit avoir un côté caché, elle cherche à se protéger... Là, je me perds un peu...

K : À partir de quel moment t’es-tu sentie femme ?
Moi, je me suis toujours sentie femme dans mon corps et homme dans ma tête ! Cela veut dire qu’on m’a donné un corps de femme et je l’assume. Mais dans ma tête, je pense avoir la force mentale et physique d’un homme... Non, je ne vais pas aller jusque là (rires). Maintenant je vais me trouver un Stallone, au moins je me sentirai femme ! Parce que ce sera un homme, un vrai.

K : Pour devenir vraiment une femme, il faut rencontrer un vrai homme, c’est quoi “le vrai homme” ?
L’homme costaud dans sa tête, le seul le vrai homme que j’ai connu c’est mon père... c’est tout.

K : C’est quoi, les qualités d’un “vrai homme” ?
C’est un homme qui mène la maison, qui ramène l’argent à la maison, qui soutient la femme, qui sache la comprendre, qui lui fait des gosses, qui travaille toute sa vie et qui ne prend pas un jour de congé, pour rendre sa femme heureuse pour bâtir pour quelque chose.

K : C’est lui qui doit décider ? Faire preuve d’autorité ?
Oui, bien sûr, l’autorité pesée, sachant que la femme a son mot à dire quand même, vous comprenez ? Voilà.

K : Les “hommes de maintenant” n’assument pas leur rôle ? Ou ça a toujours été comme ça ?
La génération passée, je pense que les hommes avaient plus d’autorité naturelle, de l’importance dans la famille. Maintenant j’ai l’impression que ça se dégrade de plus en plus. L’homme ne donne plus autant d’importance à la femme qu’avant.

K : Dans certains couples, on ne veut pas que ça soit l’homme qui décide.
Je ne vois pas en quoi ça les bloque, le fait d’avoir un homme à la maison qui fait ce qu’il a à faire dans la vie de couple, les responsabilités. Je ne vois vraiment pas ce qui les gêne.

K : Si tu avais une copine comme ça, que lui dirais-tu ?
Je dirais : “Mais elle est folle, tu n’es pas bien dans ta tête"... (rires) !

K : Les hommes disent des femmes qu’elles sont infidèles, qu’en penses-tu ? Et les femmes disent d’eux qu’ils sont cruels ?
Parfois c’est l’inverse. La conquête, c’est un comportement un peu animal, de toute façon et une conquête de plusieurs femmes...

K : Pour vous, dans un couple, il faut être fidèle ?
Hum... oui, c’est la base, il me semble. Je suis peut-être encore à l’ancienne époque mais enfin mais il me semble que c’est la base.

K : À quoi te fait penser une personne infidèle ?
Un tombeur, un charmeur, quelqu’un qui a besoin de conquérir, quelqu’un qui a besoin de se rassurer mentalement et qui va voir ailleurs.

K : Les femmes n’aiment pas les tombeurs, les charmeurs ?
Elles aiment peut-être pour elles, mais pas pour les autres, oui ! Et oui, voilà à ce moment-là, on ne prend pas ni les tombeurs, ni les charmeurs, si elles ne veulent pas qu’ils aillent voir ailleurs...

Propos reueillis par Sohad Tari, décembre 2004

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