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Fallait pas partir comme ça ! - Mutations urbaines - La république en chantier - Paroles de commerçants - La revue du témoignage urbain

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Paroles de commerçants

Fallait pas partir comme ça !

Au n°48

Madame Bouchiki a investi ses locaux rue de la République en 1995. Après deux ans de travaux, elle ouvrait enfin sa table au "Romarin". Aujourd’hui encore, après déjà dix ans d’exercice dans "la cuisine traditionnelle qui n’est pas robotisée", elle assure le service dans un cadre aussi reluisant qu’au premier jour.


Le Romarin
 Le Romarin

Ça paraît neuf...
On a l’impression que c’est neuf, mais c’est beaucoup de travail, beaucoup d’investissements, beaucoup de propreté et beaucoup d’hygiène derrière. Je passe tous les matins à nettoyer et une fois par an je refais la peinture et les locaux de cuisine. Ils disent "Eurazeo réhabilite pour louer", moi j’ai pas attendu pour réhabiliter : quand j’ai pris ici, j’ai fait une création d’entreprise ; c’était une boulangerie-pâtisserie fermée depuis cinq ans. J’ai fait cinquante mille euros de travaux avec factures à l’appui. C’est pour ça que je ne partirai pas d’ici. Le dédommagement, il est relatif au chiffre d’affaires. Eurazeo, ils ne rachètent pas comme ça.

Propriétaire du fonds ?
Je suis chez moi à l’intérieur des murs. L’appartement est rattaché au commerce. C’est trop petit, et j’espère que j’aurai droit aux travaux comme dans tous les appartements, il faut que je voie cela avec mon propriétaire.

Marseille République...
C’est pas Marseille République. Marseille République c’est un logo. Ils l’ont pris pour faire couleur locale. C’est une société de gestion qui est mandatée pour encaisser les loyers. Marseille République, c’est une société qui parle au nom de ceux qui ont acheté ; donc pour les commerces, c’est le groupe Eurazeo et pour les appartements, c’est d’autres groupes. Mais c’est pas des Marseillais. Nous, on est marseillais. Derrière eux, c’est des fonds de pensions américains. Ils n’ont pas la chance d’avoir une retraite parallèle à la nôtre, c’est une retraite privée, ils la prennent dans les assurances.

Les travaux...
Si vous regardez bien, ça a commencé en janvier 2004. J’avais une terrasse, ça a été supprimé. Les premiers travaux qu’on a eus, c’était des travaux de liaisons EDF juste devant la devanture. Il a fallu faire passer les câbles. Ensuite, c’est France Télécom qui est passé, et ensuite c’est la Société des Eaux. Et là, ils sont passés les bulldozers pour creuser le parking de 800 places. C’est pas encore fini et j’espère qu’ils ne prendront pas trop de retard parce que, normalement, c’est prévu pour fin 2006. Ça dure depuis deux ans. Là on repart sur la troisième année, sur trois ans j’ai tenu deux ans. J’ai développé une certaine clientèle. J’ai vu arriver tous les nouveaux patrons. Des plus anciens, vous avez moi, vous avez la boulangerie, Madame Breda, y a le petit snack à côté. Sinon ce sera que des nouveaux propriétaires. À moins d’avoir une proposition très intéressante, fallait pas partir comme ça. En rachetant les commerces, ils vont refaire tous les appartements, avec le parking etc... Ils vont doubler leurs prix. Comme ici j’ai un loyer de 1150 euros, si je vends à Eurazeo, ils vont payer entre trois et quatre mille euros par mois.

Encore deux ans...
Arrêtez de me dire ça, c’est prévu pour fin 2006. Dernier semestre, voilà, dans un an. On est en début d’année, donc dans onze mois. On aura un peu plus de monde. Je me souviens de la rue de la République, où une fois par an y avait le marché provençal, on vendait les produits du terroir, on avait de la danse folklorique provençale sur la place Sadi Carnot, c’était superbe. C’est fini, tout cela.

Du désagrément...
Dur sur le chiffre et sur la clientèle. Je ne sais pas si vous avez remarqué, on a les palissades juste devant la devanture et les passages piétons, c’est un vrai labyrinthe. Donc, y a déjà ça. Les gens n’ont plus de place pour se garer, j’ai beaucoup de clients... c’est simple, je tournais à 50, 55 couverts le midi, maintenant je suis à une vingtaine de couverts. C’est quasiment 50% du chiffres d’affaires en moins. Nous étions quatre, nous ne sommes plus que deux : j’ai été obligée de licencier du personnel, le commis et une serveuse à mi-temps, j’arrivais plus à payer. Je sais pas si vous avez remarqué, on ferme tous les uns après les autres, on n’est plus beaucoup. Je me prive sur beaucoup de choses, sur mes vacances, vacances d’hiver, sur mes grandes vacances. Et c’est restriction sur mon budget personnel. Faut pouvoir payer le cuisinier, voilà, voilà, et c’est pour ça que j’assure le service toute seule.

Les clients...
Eh bien ils disent qu’il faut vraiment apprécier le "Romarin" et bien manger au "Romarin" pour venir me voir. En sortant du boulot on n’a pas envie d’entendre du bruit. C’est un moment de détente, le déjeuner, entre midi et deux c’est la coupure... Bien sûr, tout le monde râle. C’est très désagréable, quand on ne s’entend plus et qu’on entend du bruit. Après on se dit on va là, on va pas là, on va au Centre Bourse, galerie marchande, on va encore plus loin. Encore, là ça va, mais vous auriez vu y a six mois... J’ai pris des photos.

Dédommagée...
Au niveau du parking, non, parce que c’est déclaré d’Utilité Publique mais pour le tracé du tramway on nous a remis un dossier pris à la chambre du commerce où on demande un report de charge, un échéancier au niveau de l’URSSAF, mais ça sert à rien parce qu’avant on pouvait le demander et on nous l’accordait.

Le parking et...
Un bassin de rétention d’eau, parce que si jamais on a une catastrophe naturelle, que le Vieux-Port déborde, pas par rapport à la Sardine. Et le tram pour dégager le Centre-Ville des voitures. Avec le parking ils auront plus envie d’aller dans le centre. Jusqu’à présent, ils filaient vers les grands centres où, là, ils avaient leur parking ; au Grand Littoral, ils ont pas besoin de chercher. J’espère qu’ils auront pas des prix trop chers parce que la rue de la République c’est pas le Prado.

Drôle de chantier...
Disons que c’est bien pour notre ville, disons que c’est l’image de marque qui change, c’est du bon changement. On a plus de touristes. D’après la maquette, il va y avoir des palmiers. Il ne faut pas qu’on nous laisse tomber, nous les Marseillais.

Marseillaise...
Non, de Grenoble, Grenobloise. Je suis arrivée, j’avais dix-huit ans, ça fait quand même vingt ans que je suis ici. J’ai eu du mal, mais on tombe vite amoureux de cette ville, très très vite de ses habitants... Je trouve que les Marseillais, c’est des gens formidables. Ils sont sympathiques, ils ont tout. C’est un cocktail de toute la France, c’est un bon mélange, un patchwork.

Propos recueillis le 19 janvier 2006 par Étienne Barbier ; rédaction : Patricia Rouillard.

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