La Koinè, la langue commune. Au pluriel : Koinai.
S’il existe une ville en France qui tout au long de son histoire a vu ses langues se conjuguer au pluriel, c’est certainement Marseille. Multiples langages et donc multiples cultures.
Notre revue se veut le témoin de cette diversité singulière. Laissant traîner ses oreilles dans la ville, toujours à hauteur d’hommes, elle glane, ça et là, des témoignages. Ces paroles de marseillais sont retranscrites au plus près de l’authenticité du moment parlé, de leur musicalité propre, vivantes.
Marseille a commencé sa mue. Comment la ville et ses transformations modifient l’homme et ses habitudes ? Comment l’homme inscrit-il son récit individuel dans celui, collectif, de la ville ? Cette période de transition convoque dans l’écho de ses voix à la fois les ombres du passé, et l’esquisse de l’avenir.
Koinai recueille ces voix qui façonnent la ville.
Mauvaise épouse, bon professeur
« Ma mère n’a jamais travaillé. Quand j’étais petite, j’ai entendu - j’ai un souvenir précis - ma mère dire à mon père : "Georges, je n’ai plus d’argent, tu pourrais me donner ma semaine ?" Il disait : "Oh l’argent, tu crois que je le fabrique ?" Il devait pas en avoir non plus, ou il voulait pas en donner, je sais pas, et j’avais honte pour ma mère, et je m’étais dit : "Moi il faudra pas que ça m’arrive." Même si j’avais des coups au coeur, ma vie était axée pour réussir, bien travailler, être autonome financièrement. J’ai été nommée professeur à Gap. Ensuite je suis venue à Marseille, pour suivre mon ex-mari. J’ai été d’abord professeur au lycée Longchamp, et puis au lycée Nord. » Odile Hartmann-Mondon, 68 ans, membre de Radio Galère.
Fallait pas partir comme ça !
Au n°48
Madame Bouchiki a investi ses locaux rue de la République en 1995. Après deux ans de travaux, elle ouvrait enfin sa table au "Romarin". Aujourd’hui encore, après déjà dix ans d’exercice dans "la cuisine traditionnelle qui n’est pas robotisée", elle assure le service dans un cadre aussi reluisant qu’au premier jour.
Antoine au fourneau, elle au créneau
« Femme ? Quand, déjà, j’ai rencontré l’autre sexe, hein ; c’est le regard aussi de l’autre sexe qui m’a renvoyée à mon côté femme. Mais peut-être aussi la féminité de ma mère, le regard de mon père. Déjà la petite fille, elle voit sa mère, elle voit le regard de son père regarder sa mère : y’a déjà de la femme, y’a de l’homme puisque c’est très lié… enfin, dans notre culture. » Hélène Soun, 52 ans, thérapeute.
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