Les fumets de la civilisation
Vous le saviez, vous, qu’il existait un centre qui recensait les odeurs signalées çà et là par des bé-nez-voles ? SRO PACA, centre de surveillance des odeurs, est en fait rattaché à Airfobep (qui a pour objet la qualité de l’air, et pas que d’un point de vue olfactif). Amusés et intrigués, nous sommes allés à Martigues interroger son président, Mr Mauro, afin qu’il apaise notre curiosité et nous raconte comment on évalue une odeur et à quoi sert, concrètement, de la signaler...
Voir en ligne : AIRFOBEP - Qualité de l’air de l’étang de Berre et de l’Ouest des Bouches-du-Rhône
K : Comment a été créée l’association ?
Jean-François Mauro : L’association a été créée il y a plus de 40 ans maintenant, en 1972. Pour refaire un peu d’historique, dans les années 60/70, la zone de Fos a connu une forte industrialisation : ça a été une volonté nationale de faire de cette zone, une zone industrielle. À l’époque les connaissances sur l’impact de l’industrie sur l’environnement étaient relativement modestes. Et donc, a été créée une première structure qui s’appelle le SPPPI (Secrétariat Permanent pour la Prévention des Pollutions Industrielles) qui avait pour objet de réunir tous les acteurs (élus locaux, monde associatif, industriels, services de l’état), pour échanger, justement, sur toutes les questions liées à l’industrie et à son impact. Et assez rapidement, a émergé la thématique de la qualité de l’air : le SPPPI s’est doté d’un outil, d’un observatoire de surveillance, et c’est à son initiative donc qu’AirFobep a été créé en 72, pour ne travailler que sur la qualité de l’air. Ça a été vraiment une idée précurseur, parce qu’à l’époque, cette thématique échappait aux préoccupations des populations et des élus, et donc AirForbep a réellement été la première association créée.
Sur le modèle d’AirFobep, en 96, dans le cadre de la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie, a émergé une obligation de surveillance, quel que soit l’endroit du territoire français. Et donc, des tas d’autres associations, avec les mêmes organisations, les mêmes missions ont vu le jour, à Paris, à Lyon, à Marseille et ailleurs, jusqu’à regrouper maintenant plus de 30 associations, qui couvrent tout le territoire français ainsi que les départements d’outre-mer. Donc c’est maintenant un droit de connaître la qualité de l’air qu’on respire ; les associations sont les acteurs au plus près du terrain pour donner cette information.
K : Comment on évalue une odeur ?
Alors, il y a deux choses qu’il faut garder à l’esprit.
La question des odeurs, ce n’est pas notre métier premier : c’est une mission qui nous a été confiée, là aussi, par le préfet, mais plutôt dans les années 2000.
Pour mesurer la qualité de l’air, c’est relativement simple maintenant. On a des analyseurs, des outils qui prélèvent l’air, qui l’analysent et qui, tous les quarts d’heure, nous donnent sa composition et nous permet de savoir si cet air est pollué ou non, quelle est la qualité de cet air. Ça répond à des critères et à des normes bien définis.
Sur la question des odeurs, on est sur une thématique qui est complètement différente. Il n’existe pas d’outil universel, d’analyseur qui permette de qualifier l’odeur ou la gêne. Pourquoi ? Parce qu’on peut ressentir une odeur à
des niveaux de concentration qui sont très très très faibles, imperceptibles par un analyseur. On n’a pas d’outils qui, enfin... il y a une quantité et une palette de composés qui peuvent générer des odeurs qui est tellement importante qu’on n’a pas d’outils pour mesurer tous ces composés. Et puis, l’objectif finalement pour nous, ce n’était pas d’analyser une odeur, mais plutôt d’essayer de percevoir la gêne. Et pour percevoir une gêne, il faut intégrer la subjectivité des gens et le fait que les choses peuvent... gêner votre nez, et pas forcément me gêner moi-même. Donc, on s’appuie sur le nez humain et sur des gens qui nous font part de leurs observations, soit en étant impliqués assez régulièrement, soit au coup par coup. Et là, c’est tout un chacun qui peut, au travers d’un numéro vert [1], nous alerter lorsqu’il ressent une gêne importante, que ce soit chez lui, sur son lieu de travail, sur la route, en balade le week-end...
K : Ah ! Donc c’est pas forcément dans les lieux publics ?
Non, ce n’est pas forcément dans une atmosphère extérieure. Après, les odeurs peuvent aussi gêner jusqu’à l’intérieur des bâtiments, mais c’est une perception, effectivement là où on vit, là où on est, là où on évolue.
K : Vous devez avoir à faire, là, avec Fos à côté...
Alors, c’est vrai que là, en région PACA, l’apparentement majoritaire des odeurs qui nous sont révélées ont plutôt trait aux activités industrielles... toute activité industrielle liée à la transformation du pétrole, mais aussi les activités industrielles qu’on oublie souvent : celle du traitement des déchets. Donc il y a ce gros pendant lié à l’industrie.
Après on est sur des problématiques de proximité : proximité au trafic, proximité à une installation, proximité à un restaurant, à un pressing... Il y a des tas d’activités qui peuvent générer une gêne.
K : Il y a quelque chose à faire si on habite à côté d’un pressing ou d’un restaurant ?
La première chose à faire, c’est de nous alerter, pour que nous, on puisse déjà recevoir cette information-là. C’est une manière de quantifier. Si la personne nous appelle tous les jours, c’est que la situation est trop récurrente, qu’elle est difficile à vivre, donc qu’elle mérite... Comment dire, d’être mise en lumière, qu’elle mérite d’être traitée.
Donc l’important c’est vraiment d’abord de nous appeler pour qu’on identifie le problème, parce que si les gens ne se plaignent pas, c’est qu’il n’y a pas de problème, notamment dans l’esprit de ceux qui peuvent intervenir.
Ensuite notre travail c’est effectivement de réceptionner cette plainte, d’en faire des traitements en regardant quelle est la direction des vents, quelles sont les activités à proximité du lieu où elle a été ressentie, de faire un certain nombre de croisements pour ensuite mettre entre les mains du pouvoir de police compétent (pour l’industrie c’est le service du préfet, pour des problématiques de proximité ou urbaines, c’est plutôt les services municipaux) des éléments d’analyse qui leur permettent d’aller taper sur les doigts de ceux qui génèrent ces mauvaises odeurs et tenter d’améliorer la situation.
K : D’accord. Donc un restaurant peut diminuer ses émissions.
Tout à fait. Il existe de toute manière une réglementation de plus en plus importante sur les questions de nuisances olfactives. C’est une réglementation assez récente, mais qui s’étoffe année après année. Il y a une réglementation comme pour le bruit, qui est en train de se construire et qui va faire que tel ou tel établissement devra respecter des normes en termes de nuisances odorantes.
K : Vous parliez de la composition de l’air aussi tout à l’heure : qu’est-ce qu’il y a justement dans la composition de l’air ? Quels sont les éléments qui varient et font qu’il est plus ou moins respirable ?
En fait, ce qu’on appelle les polluants atmosphériques ne représentent qu’un pour cent de ce que nous respirons tous les jours. L’azote et l’oxygène représentent 99% de la composition de l’air, et c’est dans le 1% restant qu’on trouve une grande variété de composés, plus ou moins agressifs pour l’homme, qui sont qualifiés de polluants atmosphériques. Donc la composition de l’air elle est toujours la même, elle est toujours donc de ces 99% / 1%, et effectivement dans ce 1% on peut avoir des composés qui ont des effets néfastes sur la santé, néfastes pour l’environnement, pour les écosystèmes.
L’idée c’est d’y être attentif et de comparer les teneurs de gaz polluants qu’on mesure, à des valeurs qui sont définies et qui définissent des limites à ne pas dépasser. Parce que, à partir de ces limites-là, il peut y avoir un impact sur la population, notamment les populations sensibles : les plus jeunes d’entre nous, les plus âgés d’entre nous et puis ceux qui souffrent déjà de maladies respiratoires, dont les symptômes peuvent être aggravés par des situations de pollution.
K : Et les allergies.
Tout à fait.
K : Vous devez faire des statistiques... Comment ça a évolué ces dix dernières années ?
Alors les statistiques on en fait en quotidien, en hebdomadaire, en mensuel, en annuel..., et comme Airfobep existe depuis plus de quarante ans, on a aussi des tendances qui se dessinent. Comme je vous le disais, la surveillance originelle de la qualité de l’air était plutôt là pour cibler l’industrie. Au fil du temps on s’est aussi aperçus que d’autres activités, notamment plus urbaines, comme les transports, généraient aussi des polluants. Donc on a aussi densifié la surveillance sur, entre guillemets, “ces nouvelles activités”, ces nouvelles sources à l’époque.
Ce qu’il faut savoir c’est que la quasi-totalité des activités humaines sont susceptibles de générer des polluants, donc ça nécessite une attention de tous les jours. Sur certains polluants industriels, je pense notamment au dioxyde de soufre... Depuis plus de quarante ans, on a bien compris les mécanismes de création du dioxyde de soufre et les phénomènes de pollution que ça pouvait engendrer. Donc, par la voie d’une réglementation de plus en plus dure sur les sources de ces dioxydes de soufre, on a vu une tendance à la baisse de ces émissions, qui s’est traduite aussi par une tendance à la baisse de tous les indicateurs qualités de l’air. Donc globalement une amélioration notable, avec des émissions divisées par quasiment six, en moins d’une vingtaine d’années, de ces situations de pollutions.
Pour autant, depuis ont émergé d’autres composés, dont certains sont associés à l’industrie, et d’autres sont associés au trafic : je pense aux particules en suspension, à l’ozone... Pour l’instant on a encore des résultats mitigés pour ces deux polluants, parce qu’on n’a pas forcément la même maturité et qu’on n’a peut-être pas forcément la même volonté pour aboutir et voir les situations s’améliorer. Donc pour certains polluants, la tendance est plutôt bonne et plutôt à la baisse, et pour d’autres, pour l’instant on est sur des situations qui perdurent depuis de nombreuses années, qui peuvent êtres variables, soit dans le temps, soit dans l’intensité des phénomènes, soit de part des zones géographiques qui sont concernées.
K : Comment vous faites les mesures, vous installez des capteurs ?
C’est ça, on a des capteurs. On a une trentaine de stations de mesures qui abritent toutes un ou plusieurs capteurs, qui fonctionnent en continu 24/24H en prélevant l’air et en faisant des analyses. Donc les méthodes qui sont utilisées, c’est essentiellement des capteurs optiques avec des technologies ultra-violets, ce genre de choses, ou alors des capteurs physico-chimiques : c’est une analyse chimique de la composition qui est faite.
K : Ça doit coûter assez cher, non ?
Un capteur ça coûte entre 15 000 et 45 000 euros, en fonction du composé qui est mesuré. Donc oui, ça coûte très très cher et il faut des moyens importants pour pouvoir assurer cette surveillance.
K : Comment est financé Airfobep ?
AirFobep a une structure de fonctionnement qui est collégiale, comme l’est celle du SPPPI, avec trois collèges (collectivités locales, services de l’État, monde industriel et monde associatif) ; chacun de ces collèges siège au sein de l’association et finance le fonctionnement de l’association. Donc on a une structure de financement qui est, on va dire de 30% d’origine de l’État, de 20% d’origine collectivités locales, et de 50% d’origine industrielle.
Ce qu’il faut préciser pour les contributions industrielles, en fait, c’est que c’est l’application du principe pollueur/payeur, c’est-à-dire qu’il existe une taxe sur les activités polluantes et cette taxe peut être reversée aux associations de surveillance de la qualité de l’air. L’idée c’est de réinvestir localement cette taxe pour permettre de mieux connaître et d’améliorer les situations de pollution. Donc les industriels contribuent à Airfobep via le reversement de cette taxe.
K : Vous avez beaucoup d’employés ?
Alors AirFobep, c’est un budget en fonctionnement d’un million cinq cent mille euros à peu prés : c’est dix personnes permanentes, quelques CDD en fonction de l’activité, en fonction des projets, des choses qui peuvent surgir au cours d’une année. Sur ces dix salariés, c’est essentiellement des profils scientifiques, soit des techniciens, soit des ingénieurs, puis on a un peu de personnel administratif.
K : Au sujet des nez bénévoles : n’importe qui peut vous signaler une gêne ?
Alors voilà, il y a les deux possibilités. Soit on ne veut pas forcément s’investir et on a, quoi qu’il arrive, la possibilité d’appeler le numéro vert. Tout un chacun, à partir du moment où il ressent une gêne, peut passer un coup de fil et nous alerter.
Et puis après y a des jurys de nez bénévoles et là, ce sont des gens qui, une semaine par mois, nous font état de leur ressenti : qu’ils ressentent une odeur ou qu’ils n’en ressentent pas, c’est une manière de voir un petit peu la situation moyenne à un moment donné. Donc on fournit un certain nombre de questionnaires à ces personnes, qui nous les retournent via des enveloppes T et ensuite on traite, on fait un dépouillement de ces observations. Là il faut déjà être un petit peu plus disponible, et avoir envie de contribuer au bon fonctionnement de l’observatoire.
Ça représente plus de 200 nez sur l’ensemble de la région PACA, avec quand même la grande majorité d’entre eux sur le département des Bouches-du-Rhône.
K : Vous recevez beaucoup d’appels ?
C’est très variable, ça dépend des situations, mais oui, on reçoit de plus en plus d’appels. D’abord parce qu’il y a une notoriété de plus en plus importante : les gens ont pris la bonne habitude de nous appeler, et au-delà de cette habitude ils ont compris que l’observatoire pouvait servir à une amélioration de la situation.
Les chiffres figurent dans le bilan... c’est plus de 2000 plaintes par an, 2070 pour être précis, en 2007. Et quand on regarde l’évolution, on est passés de 500 plaintes en 2005 à plus de 2000 plaintes en 2009. Ça prouve bien qu’il y a ces deux explications, à la fois la notoriété qui est plus importante et donc les gens qui nous appellent plus facilement, et puis l’importance de l’observatoire dans la lutte contre ces mauvaises odeurs.
K : Quelqu’un qui serait sur Marseille, il devrait s’adresser à l’association qui est sur Marseille ?
Non, pas du tout. Le numéro vert est valable quel que soit l’endroit du territoire régional ; ensuite, en fonction de votre code postal vous êtes réorienté vers des gens différents. L’observatoire est le même en région PACA, c’est AirFobep qui gère son fonctionnement, mais effectivement il y a des opérateurs différents.
K : Qu’est-ce qu’on peut faire pour améliorer la qualité de l’air chez soi ?
C’est plein de petits gestes citoyens. La première chose c’est une logique associée au transport, puisque ça reste la problématique la plus importante en milieu urbain. Si on est très attaché à son véhicule : être attentif à ce qu’il peut émettre, donc avoir plutôt des voitures de petite cylindrée ou des véhicules dits propres, à savoir roulant, on va dire, au gaz naturel ou à l’électrique. Bon, bien que les technologies soient pas toujours disponibles sur le marché...
Si on est un peu moins attaché à sa voiture, l’idée c’est de limiter ses déplacements et de pratiquer plutôt le transport en commun. L’offre est suffisante.
Ensuite c’est plein de petits gestes sur les produits d’entretien, parce qu’on est en train de parler de l’air extérieur, mais on passe le plus clair de notre temps dans une ambiance intérieure, et en fonction des produits que l’on utilise, en fonction du mobilier que l’on achète, on peut être aussi soumis à une pollution et à des composés nocifs. Donc il faut une attention particulière là-dessus. Il faut bien entretenir sa chaudière. Il faut trier ses déchets parce qu’indirectement, la gestion des déchets engendre ensuite une éventuelle pollution en fonction de la manière dont ils sont traités : ce sont des activités industrielles, en fonction des technologies qui sont utilisées on a plus ou moins d’émission de polluants qui peut y être associée. Donc le fait de trier ses déchets, de faire attention à ses emballages, de faire un travail à la source, ça permet aussi d’envoyer le moins de choses possible dans ces installations industrielles qui génèrent des polluants.
C’est un ensemble de petits gestes de la sorte qu’il faut garder à l’esprit ; on est aussi des acteurs au travers de nos actes de consommations et on peut aussi influer sur les produits qui sont mis sur le marché en faisant des choix citoyens ou éco-citoyens.
K : Vous parliez du mobilier. Il y a quoi par exemple, qui n’est pas bon pour l’air intérieur ?
Alors tous les mobiliers qui sont faits en bois compressé. Le bois compressé, en plus, est lié... enfin tous ces copeaux de bois sont liés entre eux par des colles, c’est très mauvais parce que ça dégage de mauvais composés.
Le Grenelle de l’environnement prévoyait la mise sur le marché d’un étiquetage, comme c’est le cas pour les voitures ou pour les performances énergétiques des machines à laver : un étiquetage sur les émissions liées au mobilier, liées aussi à certains matériaux de construction [2]. Donc c’est dans l’air du temps, c’est des choses vers lesquelles on va aller de plus en plus : être sensible à l’impact environnemental de ce que nous consommons au quotidien.
K : On n’y pense pas forcément, que les meubles dégagent des polluants.
Ben c’est une prise de conscience récente, c’est ce qui est intéressant dans nos métiers, c’est que l’on reste sur des thématiques qui sont scientifiques, et la science évolue en fonction de l’état des connaissances : on en découvre chaque jour, c’est un perpétuel recommencement et une perpétuelle remise en question. Ce qui fait que l’on s’ennuie rarement dans mon métier. Quand on pense en avoir terminé avec un sujet, il y en a un autre qui émerge, tout aussi important, des fois encore plus important que le précédent. Mais oui les meubles aussi, les produits d’entretien, les peintures...
K : Est-ce que les plantes dépolluantes sont efficaces pour purifier l’air intérieur ?
Ça fait partie des choses qui peuvent contribuer à dépolluer son air intérieur, mais le premier geste qu’il faut garder à l’esprit c’est le fait d’aérer, d’essayer d’aérer au moins une petite dizaine de minutes par jour.
K : Même en ville ?
Même en ville et même l’hiver, lorsqu’on le peut, pour renouveler l’air. C’est vrai qu’avec toutes les problématiques d’isolation, on a plutôt tendance à se confiner dans son bâtiment et à rarement ouvrir les fenêtres, mais de temps en temps il faut le faire, aérer un peu, renouveler l’air.
K : Ça vaut vraiment le coup d’aérer si on habite, disons, sur une avenue où il y a beaucoup de trafic ?
Ce qu’il faut essayer de faire alors, c’est d’aérer quand le trafic est moins important, soit très tôt le matin, soit un petit peu plus tard dans la soirée ; c’est sûr, pas aux heures de pointe. C’est vrai que vivre au-dessus d’un axe roulant, passant, dans une ville, ça a un impact sur notre santé, sur la qualité de l’air que l’on respire.
K : Vous travaillez avec Atmo Paca ?
Oui, on travaille très régulièrement avec eux, nous sommes deux associations en PACA pour surveiller la qualité de l’air sur la question des
odeurs et sur des tas d’autres thématiques, on a des projets communs, on a des outils communs aussi. L’observatoire c’est un outil commun à la région PACA. On a des outils informatiques communs pour acquérir des données en région PACA, un laboratoire commun pour étalonner nos matériels, des outils de modélisation communs à l’échelle de PACA. Donc oui on pratique le même métier, sur des territoires qui sont différents, plutôt urbain pour Atmo Paca, plutôt industriel pour Airfobep, mais nos outils, nos méthodes, nos manières de travailler sont les mêmes.
K : Depuis combien de temps vous faites ce travail ?
Moi personnellement ça fait cinq ans, mais bon, certains d’entre nous sont là depuis plus de 30 ans et sans se lasser, donc tant mieux pour eux ! Pour moi c’est un travail très très intéressant d’être à la direction d’Airfobep. Bon, c’est un peu différent parce que j’ai à la fois ce bagage scientifique et puis un bagage gestionnaire aussi, management, communication. Mais voilà, moi je suis ravi ; ça a été une découverte aussi parce que j’étais plutôt originaire de Marseille et, même si il n’y a que 40 km qui séparent Marseille de Martigues, c’est quand même un environnement très marqué par l’industrie et avec des attentes fortes des populations pour savoir ce qui se joue, ce qui se trame au-dessus de leurs têtes. Et donc, nous cette attente, on la ressent, et pour nous c’est une exigence par rapport au travail que l’on fournit, à la qualité des informations que l’on peut communiquer.
Les élus aussi, sont très, très à cheval et très attentifs à ce qui peut être dit et produit en terme de qualité de l’air, parce que charge à eux aussi de se saisir de ces sujets pour intervenir lorsque les situations l’exigent : intervenir auprès de leurs services lorsque c’est eux qui ont la compétence, ou alors alerter les services de l’État, la préfecture, le ministère, lorsque la compétence est une compétence d’État. Donc AirForbep c’est à la fois un outil pour mesurer, un observatoire, mais c’est aussi un outil d’aide à la décision. On peut s’appuyer sur nous, à un moment donné, pour orienter un projet, une prise de décision (le fait de passer de deux voies à une voie sur le cœur d’une ville, ou plutôt que de faire des voies à double sens, faire des voies à sens unique). On a un panel d’outils et de données qui permettent à tout un chacun d’en faire une analyse et de prendre la décision la plus adaptée pour tenter d’améliorer les situations.
K : Est-ce que vous faites le lien avec les conséquences sur la santé ou est-ce que c’est pas du tout de votre ressort ?
Alors ce n’est pas dans nos compétences, on n’a pas de gens chez nous qui ont ces compétences-là. Par contre nos données servent aux différents chercheurs, aux différentes agences, aux différents scientifiques, qui peuvent œuvrer à faire ce lien entre environnement et santé. Donc ce n’est pas Airfobep qui fait ce travail-là, mais ce sont bien les données d’Airfobep qui servent d’entrée à ces travaux.
K : Vous faisiez quoi avant ça ?
Alors avant j’étais à l’Agence De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (l’ADEME à Marseille), en délégation régionale, où je m’occupais aussi de qualité de l’air.
En fait, c’était un dispositif d’aide aux entreprises qui souhaitaient réduire leurs émissions de polluants, donc j’instruisais un certain nombre de dossiers, je veillais à ce que ce soit les meilleurs technologies qui soient appliquées pour lutter contre les émissions industrielles... déjà dans cette question de l’environnement, de la qualité de l’air. De toute manière, ma formation universitaire était déjà orientée “environnement”, c’est la physique appliquée à l’environnement, tous milieux donc : océans, atmosphère, sol. Puis le hasard de la vie professionnelle a fait que je me suis spécialisé dans la qualité de l’air et l’atmosphère, mais...!
K : Vos études, vous les avez poussées jusqu’où ?
J’ai un Bac+5, un DESS. Je sais que c’était un autre temps, que ça ne s’appelle plus comme ça... maintenant c’est un master. Bac+5 universitaire, comme je vous l’ai dit : “sciences physiques appliquées à l’environnement”.
K : Vous avez beaucoup de postulants qui veulent travailler pour Airfobep ?
Oui, très régulièrement. Là, on a ouvert un poste pour un congé maternité et on a eu plus d’une cinquantaine de candidatures, donc oui, il y a des gens qui sont intéressés par ce métier-là, qui sont curieux. Ils nous sollicitent même en dehors des recrutements. On reçoit au moins un CV par mois.
Il y a encore quelques années en arrière, c’est vrai que les formations n’étaient pas nombreuses. Elles sont de plus en plus nombreuses maintenant. Et donc, ça fournit sur le marché du travail des gens qui sont compétents sur ces thématiques. De toute manière, ce sont des thématiques qui vont monter en puissance au fil du temps, donc c’est normal qu’on ait des gens de plus en plus intéressés, puis parce que c’est aussi un intérêt des populations qui est de plus en plus important lui aussi.
K : Vous prenez des stagiaires aussi ?
Oui oui. Très régulièrement. Ça peut être des stagiaires administratifs (de secrétariat ou assistance de direction), comme des stagiaires qui vont intervenir sur des thématiques plus techniques. Des gens qui sont en BTS, ou aussi en sortant d’écoles d’ingénieurs. On a, en fonction des années et des sujets, entre 3 et 6 stagiaires par an.
K : Vous auriez quelque chose à ajouter ?
Simplement je voulais arrêter le fait que pour les gens qui sont curieux de ce qui se joue sur les questions de la qualité de l’air, on a un site internet qui est très très bien documenté. Dès qu’on arrive, on a accès à l’information, on sait ce qu’à tel ou tel endroit du territoire on peut retrouver en terme de qualité de l’air. Et puis en rentrant un peu plus profondément dans les menus, dans les onglets, on a beaucoup d’informations sur ce qu’est la qualité de l’air, les enjeux, les spécificités des territoires, ce que fait AirFobep au quotidien.
Et puis pour ceux qui sont à l’école et qui veulent jongler un peu avec les données, qui veulent faire des travaux un peu sur le sujet, il y a la possibilité de télécharger nos données : nos données sont publiques, on a une obligation de diffuser ces données-là. Donc, tous ceux qui ont un intérêt lointain ou proche relatif à la qualité de l’air, je vous invite à vous rapprocher du site internet, ou pour ceux qui ont des demandes plus spécifiques et plus ciblées à nous appeler. Je le répète, ces données vous appartiennent autant qu’à nous, il faut en profiter.
Propos recueillis par Lynda Ledolley
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