Celle qui voulait être celui
« J’ai eu du mal, j’ai eu du mal à m’accepter en tant que femme. Ça vient peut-être aussi de mon prénom hein ! Mon prénom, j’ai eu du mal à l’accepter gamine, parce que "Ève" eh ben c’est le symbole de la femme, voilà. C’est la première femme dans la religion catholique qui… C’est celle qui a porté le péché, le péché originel ! Il faut se le trimballer, ce prénom. C’est peut-être à cause de mon prénom que j’ai pas accepté le regard de l’homme… C’est surtout la maternité qui m’a fait changer, qui m’a fait me considérer différemment. » Ève Debou, 49 ans et demi, conseillère en économie sociale et familiale.
Koinai : Quand vous êtes-vous dit que vous étiez une femme ?
Quand je me suis dit ça ? Eh ben, y’a pas longtemps, y’a pas longtemps du tout. Vraiment une femme… J’ai eu plusieurs étapes parce que quand j’étais gamine, quand j’étais ado, je refusais d’être une femme. J’aurais préféré être un garçon parce que j’étais très axée sur le sport, sur les sports à risque. Puis c’était l’époque de la libération de la femme, on parlait du MLF et caetera, donc je refusais un peu la féminité. Puis j’étais pas très coquette, et en plus je ne supportais pas le regard des hommes, je trouvais qu’ils regardaient la femme plutôt comme un objet de séduction et caetera, donc je refusais ma féminité et… Je me sens femme depuis… on va dire trois ans ou quatre ans, c’est tout. Jusqu’à présent j’avais du mal à l’assumer. C’est venu petit à petit hein… J’ai eu plusieurs étapes, et je me suis sentie femme quand j’ai aimé quelqu’un aussi, voilà. Donc le partage de l’amour fait qu’on se sent plus en osmose avec le sexe qu’on porte puisque je refusais un peu ma féminité ; c’est vrai que j’aurais pu devenir homosexuelle, pourquoi pas hein ? Donc j’ai quand même accepté ma féminité puisque j’ai eu un compagnon homme et que j’ai eu un enfant. Je me suis sentie femme aussi quand j’étais enceinte.
K : Pensez-vous que la maternité soit nécessaire à l’épanouissement personnel ?
Ah pas du tout, alors là, je trouve que non, une femme n’est pas forcément faite pour enfanter et… et voilà. Effectivement, on a tous des cultures qui sont différentes, mais qui nous disent qu’une femme doit avoir des enfants. Et je suis persuadée du contraire, voilà. On n’a pas besoin forcément d’avoir un enfant pour s’épanouir. Personnellement, j’ai eu un enfant parce que mon compagnon en voulait un absolument et je lui ai fait comme cadeau, mais j’avais pas un désir de maternité très fort. J’ai compris beaucoup de choses au moment ou j’étais enceinte. Le regard, d’abord le regard des hommes était différent. Ah ! mon dieu, comme il est beau le regard des hommes, des gens dans la rue, quand on est enceinte ! J’ai trouvé ça très émouvant. L’homme ne regarde plus la femme en tant que telle, comme objet de plaisir, on va dire, ou de convoitise ou… Je ne suis pas un homme donc je sais pas ; mais il voit la femme comme quelqu’un qui porte un enfant. Et j’ai compris pourquoi beaucoup de personnes, dont je m’occupe, ayant peu de ressources, vivant des choses difficiles, étaient amenées à avoir beaucoup d’enfants : parce que c’est tellement gratifiant d’être enceinte, c’est tellement gratifiant de s’occuper d’un bébé. J’ai compris qu’à ce moment-là, que la femme pouvait avoir une identité différente : on est reconnue socialement quand on est enceinte, quand on est maman. Cette image de mère aux yeux des autres, c’est une image sociale. Je pense qu’on a envie d’être reconnu ; l’être humain a envie d’être reconnu, c’est tout. Donc, voilà ! Moi, ma reconnaissance à moi - c’est comme ça que j’ai grandi - ma reconnaissance c’était avoir un emploi qui me convient, et puis un boulot qui me plaise. Et c’est vrai qu’à côté de ça, j’ai mis ma famille et mes obligations familiales peut-être un petit peu en parenthèses. J’ai peut-être pas été assez vigilante par rapport à ma vie familiale parce que ma priorité était ailleurs.
K : Que vous apporte votre travail ?
Énormément d’épanouissement, pour moi c’était l’aboutissement, je ne pensais pas… Je n’ai jamais songé faire un travail qui ne me plaise pas. Mes parents étaient fonctionnaires et trouvaient qu’un emploi c’était, bon, quelque chose qui apportait de l’argent, qui aidait à vivre, mais que les loisirs, la vie sociale était plus importante que le travail. Et c’est marrant, curieusement, avec mon frère - on n’est que deux - on a plutôt axé notre vie sur l’emploi, sur le travail. Donc pour moi c’est un aboutissement.
K : Quel est votre cursus scolaire ?
J’ai fait un bac littéraire axé sur les langues étrangères anglais-espagnol-italien. Ensuite un peu de faculté, parce que je voulais rentrer dans une école d’assistante sociale ; j’ai pas été recrutée tout de suite. J’étais certainement jugée trop jeune, trop immature. Donc j’ai fait une année en sociologie. Ensuite j’ai passé ces concours d’entrée à l’école d’assistante sociale, plus un autre qui semblait tout autant intéressant, qui était la préparation au diplôme d’état de conseillère en économie sociale et familiale. Donc j’ai réussi cette entrée à l’école, et là j’ai fait deux ans de BTS. À la fin du BTS, j’avais pas envie d’être à la charge de mes parents, donc j’ai travaillé. J’ai été pendant cinq ans professeur : j’enseignais les travaux ménagers en polytechnique de collectivité, dans des classes qu’on appelle maintenant les SECTA qui à l’époque étaient les SS. C’est des enfants qui sont jugés débiles légers et caractériels, des enfants qui n’arrivent pas à suivre un cursus scolaire normal, c’est dans certains collèges. Mais vraiment ça m’a pas plu, du tout. Donc, après j’ai repris mes études et j’ai passé mon diplôme d’état de conseillère en économie sociale et familiale, et là au moins c’était une formation professionnelle rémunérée puisque j’avais travaillé déjà cinq ans.
K : Quel est votre parcours professionnel ?
Quand j’ai arrêté l’enseignement - parce que vraiment c’est quelque chose qui ne me plaisait pas, j’étais au bord de la dépression - j’ai eu un an de battement. J’ai fait des petits boulots : des ménages, garder des enfants ; j’ai vendu des encyclopédies en porte à porte… Et puis j’ai repris donc mes études et après, j’ai toujours fait conseillère en économie sociale et familiale, et actuellement je suis cadre dans l’entreprise où je travaille depuis un an et demi. Je suis responsable du service social.
K : Arriviez-vous à concilier travail et famille ?
J’y suis jamais bien arrivée non, parce que bon, moi, le plus important c’était l’emploi, et je pense que c’est un petit peu ça qui a fait sauter mon ménage, parce que mon compagnon n’arrivait pas à s’y retrouver. Je suis séparée, j’ai un enfant à ma charge ; il va avoir dix-huit ans dans quelques jours.
K : Quelles sont vos obligations en tant que mère ?
Les obligations en tant que mère ?… C’est pas aussi simple que ça. Les obligations eh ben… c’est l’obligation d’être présente, d’être présente et…comment dire ?… de faire attention à soi-même pour le bien-être de l’enfant. C’est important. Je trouve qu’une femme doit… Parce que bon moi, je faisais pas très attention à moi. Moi, ce qui était important, c’était l’autre, mon métier - d’ailleurs je travaille dans le social - et quand j’ai eu un enfant, je me suis dit : "Il faut que je fasse attention à moi, il faut pas que je meure déjà." Donc que j’aie pas des activités dangereuses pour pouvoir vivre pendant le temps où j’ai mon enfant à charge. Je trouve que ça, c’est le plus important, là ! Après il y a plein de choses qui découlent : on doit nourrir son enfant, veiller au bien-être de son enfant, c’est-à-dire essayer de préserver tout ce qu’on a acquis pour lui. Et je suis pas arrivée à préserver ma vie familiale, puisque je suis séparée. Ça c’est ma grosse erreur, c’est la seule chose que j’ai pas pu maîtriser complètement et c’est dommage, parce qu’un enfant a besoin de son père et de sa mère, voilà.
K : Pour vous, qu’est-ce qu’être une femme ?
Être une femme, être une femme c’est… par rapport à l’homme ?
K : Par rapport à l’homme, par rapport à l’entourage ?
C’est difficile parce que c’est vaste comme sujet. Être une femme maintenant… d’abord, d’abord être un être humain. C’est pouvoir être libre, indépendant, pouvoir dire ce qu’on vit, pouvoir s’exprimer donc. Pour moi être une femme ou être un homme ça devrait être pratiquement la même chose. Je vois pas pourquoi une femme serait différente d’un homme. Là actuellement on parle beaucoup par exemple de Ségolène Royal qui va se présenter aux élections - je parle pas d’elle en tant que telle hein, j’ai aucune idée… Mais voilà, si on parle justement d’elle c’est parce que ce serait peut-être bien qu’une femme soit à la tête d’un pouvoir. D’ailleurs, je sais plus dans quel pays d’Amérique du Sud il y a une femme - c’est pas le Chili ? Je vais dire des conneries, hein [1] - alors il y a une femme qui a été élue comme présidente de la république dans un pays qui est machiste à la base. C’est formidable ! Donc être une femme c’est être l’égale de l’homme parce que… Et alors là, y’a encore du boulot ! Y’a encore du boulot ! J’ai très très peur qu’y ait des retours en arrière parce qu’avec tout ce qui se passe dans les cités, ces jeunes filles qui sont jugées par leur grands frères, qui ont été brûlées, qui ont été torturées justement par les gens de la cité… Je trouve ça lamentable à l’époque qu’on vit, je trouve ça lamentable. Une femme doit être respectée en tant qu’être humain comme un homme.
K : Rencontrez-vous des difficultés particulières ?
Ma difficulté justement c’était m’assumer en tant que femme, et essayer de pas imaginer le regard des hommes sur moi quoi, voilà. Beaucoup de petites filles ont vécu ce que j’ai vécu aussi hein : je me suis fait… quand j’étais gamine, je me suis fait attraper par un homme, eh ben, en bas de ma cage d’escaliers, qui m’a tripotée dans tous les sens. C’est vrai que ça m’a un peu traumatisée et moi je comprenais rien de le sexualité. À l’époque j’avais huit, neuf ans ! Et je pense que beaucoup de petites filles ont vécu ça, énormément. Il doit y avoir une très très grosse majorité, je serais curieuse de savoir le pourcentage. Et ça, c’est inacceptable, voilà. La femme d’aujourd’hui ne devrait plus avoir vécu ça. On est dans un pays démocrate avancé et caetera, alors j’imagine mal dans le pays une femme encore considérée comme un objet.
K : Êtes-vous attachée à votre mère ?
Ah j’ai un petit peu des difficultés avec ma mère, mais je suis attachée bien sûr. J’ai refusé pendant longtemps l’influence qu’elle avait sur moi, parce que j’ai toujours été en désaccord, en… - je trouve pas le mot - la dissonance, peut-être la dissonance avec la mère. Je voulais pas être proche, proche d’elle, mais je me rends compte que je suis un peu comme elle, quoi. C’est quand même elle qui m’a élevée, donc je sais, je vois bien les similitudes dans ma façon de vivre, dans mes façons de dire les choses. Je suis quand même très très semblable à elle, malgré tout, toutes les choses que j’ai refusées pendant longtemps. On peut pas repousser l’éducation qu’on a eue, hein.
K : Quelles sont les différences et les ressemblances entre vous et votre mère ?
Il y a pas beaucoup de différences, c’est juste le caractère quoi. Ma mère est une femme très autoritaire, et moi je le suis pas. C’est juste ça comme différence. Mais elle m’a appris aussi à être indépendante et ça m’a menée au fil du temps. Je pense que c’est surtout ça, moi, qui me guide et qui me retient aussi, parce que j’ai tellement envie d’être indépendante que j’ai du mal à aller vers l’autre en tant que compagnon. Je suis pas assez ouverte envers mon compagnon, envers mes compagnons que j’ai connus, parce que j’ai tellement un désir d’indépendance. J’ai eu peur de me faire bouffer, voilà !
K : Voulez-vous transmettre les valeurs reçues de votre mère à votre fils ?
J’aimerais bien oui, j’aimerais bien. J’aurais tellement voulu avoir une fille, mais je n’ai qu’un garçon, donc voilà. La valeur, oui, la valeur numéro une pour moi c’est qu’une femme doit être considérée comme l’homme, et j’aimerais bien qu’il soit comme ça. Pour l’instant encore c’est un grand ado et c’est pas sa préoccupation première, mais j’aimerais bien qu’il soit un homme épanoui dans le sens où quand il aura une vie, une vie de couple et une vie familiale, il considère sa femme comme son modèle. Je pense que si c’est pas le cas j’aurai l’impression d’avoir raté quelque chose effectivement.
K : Comment vivez-vous l’égalité entre homme et femme ?
Eh ben c’est une lutte, pour moi c’est une lutte. C’est difficile. Entre mon compagnon et moi j’essaye mais… Pour moi l’égalité entre l’homme et la femme c’est beaucoup plus général, je le vois au niveau de la société dans laquelle je vis et pour moi c’est une lutte donc y a pas encore d’égalité… dans tous les domaines. Je travaille beaucoup auprès de familles donc je vois bien que la femme reste l’épouse, la mère des enfants de l’homme, qui se considère, lui, comme chef de famille. Et la femme est rarement considérée comme un chef de famille. Rarement. Et je sens que celles qui veulent être chefs de famille, celles qui veulent se montrer à l’égale de leur mari luttent aussi. J’ai vu ça, et je trouve que quand on travaille dans le social, on est là pour ça : pas pour liguer madame contre monsieur, pas du tout, mais pour montrer à madame qu’elle est entendue, écoutée et essayer de faire, par des petites choses, par des petits détails, faire à ce que monsieur comprenne que sa femme c’est pas un objet.
K : Comment réagissez-vous quand le regard d’un homme se pose sur vous ?
Eh ben, maintenant, si un homme me regarde et qu’il me fait comprendre que je suis charmante, maintenant, ça me fait plaisir. Mais j’ai cinquante ans, donc, voilà ! Je plaisante d’ailleurs beaucoup à ce sujet-là, c’est pas… Mais avant, quand un homme me regardait comme ça, ça me plaisait pas du tout. Vers vingt ans, ça me plaisait pas. Par exemple, je suis blonde aux yeux bleus, c’est joli les yeux bleus, mais si jamais je voyais que le regard de l’homme se posait plutôt sur ma poitrine, ah… D’abord, je m’habillais toujours comme ça, quand j’avais vingt ans. Maintenant, j’arrive à m’habiller plus découverte, je m’assume en tant que telle, voilà. Je voulais pas être regardée pour mon corps, je voulais juste être regardée pour pouvoir communiquer, échanger avec l’autre mais surtout pas à ce niveau-là, donc je faisais bien le distinguo entre les deux. Maintenant j’assume, puis c’est devenu rare, là maintenant, le regard d’un homme sur une femme de cinquante ans.
K : Prenez-vous soin de vous ? Versez-vous dans la coquetterie ?
Oui, maintenant oui. La coquetterie… la coquetterie c’est quelque chose d’important, il faut surtout pas se forcer. Quand j’avais dix-sept, dix-huit ans, ma mère en avait marre que je porte des jeans sans ourlet parce que j’étais un peu… un peu hippie, hein, on va dire. Donc elle me cachait mes jeans pour que je me mette en jupe et elle m’avait même offert du maquillage, que j’ai jamais utilisé parce qu’il faut que la coquetterie soit assumée complètement ; c’est bien une femme coquette, c’est joli.
K : Quel est le rôle de vos amies femmes dans votre vie ?
Ah ! Très important, très important maintenant. Mais avant, c’est curieusement comme j’étais un petit peu un garçon manqué, je m’entendais beaucoup plus avec les copains qu’avec les copines. Maintenant les copines femmes, elles ont énormément de place dans ma vie. C’est-à-dire qu’avec les hommes au fil du temps on partage moins de choses. Parce que quand on devient mère, en même temps nos amies deviennent mères. C’est à peu près dans la même génération, donc on partage nos soucis éducatifs entre nous, entre femmes et moins avec les hommes. Donc je me suis un peu éloignée des contacts que j’avais privilégié avec les amis hommes pour me rapprocher des amies femmes.
K : Existe-t-il une solidarité féminine ?
Ah oui, oui oui bien sûr.
K : Quel message adressez-vous aux femmes ?
Tenez bon, soyez indépendantes.
K : Quels sont vos loisirs en dehors de travail ?
Je fais beaucoup de sport, du ski l’hiver, de la moto… Là en ce moment je fais beaucoup de vélo et de course à pied. Je fais beaucoup de sport et je lis énormément.
K : Comment vivez-vous le divorce ?
Bon là, il y a très longtemps qu’on est séparés : mon fils avait quatre ans et demi, et maintenant il en a dix-huit, donc faites le compte. On est restés quand même liés, parce que bon, il habite sur Marseille. Il est très présent par rapport à son fils donc j’ai voulu conserver ça. Finalement il y a de l’eau qui est passée sous les ponts mais c’est très bien. Mais je le vis très mal parce que ou je n’aurais pas dû accepter de lui faire un enfant, et là on se serait séparés, ou peut-être pas ; ou alors on aurait dû quand même être un peu plus adultes et mettre le pouce dans le poing et réfléchir mieux avant de se séparer, pour le bien de l’enfant. Parce que je pense que c’est une très mauvaise chose. Je dis pas : "Il faut pas se séparer du père de ses enfants." C’est pas ça. Mais c’est quelque chose qu’il faut réfléchir, c’est quelque chose de très important, c’est une très grande décision. Dans la vie, la plus grande décision c’est d’avoir des enfants, mais après ça c’est la décision de se dire : "On se sépare ou on se sépare pas, et pourquoi ?" On l’a pas assez réfléchie avec mon compagnon et ça je le regrette bien sûr.
K : Quel regard la famille, l’entourage ont-ils porté sur ce divorce ?
C’est tellement d’un commun maintenant de se séparer que non, le regard… Ma mère était ravie parce qu’elle n’a jamais accepté le père de mon enfant, donc elle était ravie. Elle a trouvé que c’est une bonne chose et que je m’en sortirais certainement mieux sans lui. Sur certains aspects oui, aspect financier, ça allait beaucoup mieux de vivre seule avec mon gamin parce qu’il avait un peu les mains percées, donc matériellement, j’y ai certainement gagné. Mais mon père, lui, était déçu parce qu’il est issu d’une famille séparée aussi. Pour lui ça a été beaucoup plus dur certainement. Ma grand-mère s’est séparée en trente ou en trente-trois : non, ça se faisait pas, ça se faisait pas ; elle a même dû changer de ville. Mon grand-père était un fêtard, il buvait beaucoup, il tenait un bar. Elle était certainement très amoureuse de lui parce qu’au moment de sa mort, elle a dit : "Je vais enfin te rejoindre mon amour. Je vais rejoindre ton papa, c’est l’amour de ma vie." Mon père était écroulé parce que ses parents se sont séparés alors qu’il avait cinq ans. Non, maintenant, ce qui est très dur à vivre au niveau de la séparation, c’est les amis en commun. Si j’avais su ça, au moins j’aurais peut-être plus réfléchi avant de décider qu’on se sépare parce que la vie sociale, elle change énormément. On peut plus voir les amis de la même façon, au même rythme. C’est pas qu’ils font un choix, mais on peut plus après se retrouver chez des amis ensemble, et la vie elle est différente quoi, et c’est la plupart du temps la femme qui se retire, la preuve qu’elle n’est pas égale de l’homme ! Je l’ai vu, moi, par rapport à toutes mes copines qui se sont séparées aussi : quand il y a des réunions amicales, eh ben c’est souvent les hommes qui vont vers les amis quand le couple est séparé et la femme, elle reste chez elle, elle élève les enfants ; y’a bien une preuve que la femme n’est pas égale de l’homme, avec des détails comme ça.
Propos recueillis le 30/08/06 par Dalila Bouhmadou ; rédaction : Patricia Rouillard ; image d’archives.
[1] Michelle Bachelet première femme présidente du Chili élue le 15 janvier 2006
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